Rencontre avec Sylvain Pottiez, comédien des « Echappées »

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En avril et en mai, nous sommes partis avec nos partenaires à la Comédie de Béthune dans les résidences universitaires CROUS à Lens et à Béthune afin de créer des petites bulles artistiques, dans le cadre des « Echappées ». Deux comédiens, Sylvain Pottiez et Lucy Boissonneau, ont mis en voix et en musique des extraits de textes – théâtraux et littéraires – devant des petits groupes d’habitants au sein des résidences. Nous avons interviewé Sylvain pour avoir son regard sur le théâtre pendant la crise sanitaire, et la place de l’art dans les espaces universitaires.

Pourrais-tu te présenter en quelques mots ?

Je m’appelle Sylvain Pottiez, je suis comédien et je travaille beaucoup avec la Comédie de Béthune sur différents projets et en tant qu’interprète dans les spectacles qui sont co-produits par la Comédie. Par ailleurs, je travaille avec la Spoutnik Theater Cie, dirigée par Thomas Piesecki, qui est auteur et metteur en scène. Nous travaillons un peu partout dans le nord de la France.

 

Pourrais-tu nous dire comment a commencé le projet des « échappées » ?

Ce projet a commencé quand Magali Somville de la Comédie de Béthune nous a passé une commande artistique pour des « livraisons de lectures ». Magali nous a donné, à moi ainsi qu’à Lucy Boissoneau, un thème et les conditions de ces lectures et nous a demandé de chercher des textes contemporains et de théâtre.

Il existe deux formats pour les échappées ; le premier est celui que nous avons joué dans les résidences, qui est une forme longue de 30-35 minutes sur un thème, et le deuxième consiste de lectures de textes à domicile. Il fallait donc que les textes choisis puissent s’adapter à ces deux formes.

 

Quel est le processus typique pour créer une « échappée » ?

Dans un premier temps, avec Lucy, nous lisons beaucoup de textes. Nous nous connaissons et travaillons tous les deux avec des salons littéraires dans la région. Nous essayons de trouver des textes différents afin de faire un montage précis – commencer avec un extrait qui accroche le public, puis l’amener sur un terrain qu’il ne connait pas forcément avec des textes plus exigeants tout en essayant de rester léger. Une fois les textes choisis, nous testons les lectures pour voir s’ils sont bien adaptés pour être lus à voix haute, car certains ne le sont pas. Ensuite, il faut aussi les découper, se partager la narration, donner un sens à tout cela… faire une distribution et le montage dans son ensemble. Nous demandons à l’équipe de la Comédie de nous faire des retours.

Et dans un deuxième temps, il y a tout le volet administratif et préparatif qui est prise en charge par l’équipe de la Comédie de Béthune: prendre contact avec les structures pour accueillir les échappées, comme avec le service culturel de l’université, et organiser une tournée. Et enfin, on part !

 

Tu es venu trois fois dans des résidences universitaires dans ce cadre. Quelle a été ton expérience, d’abord d’arriver dans cet endroit et puis de jouer devant des étudiants ?

Ce n’est pas évident d’arriver dans un terrain qui n’est pas « conquis ». C’est d’abord une proposition de l’université faite aux étudiants, selon les contraintes horaires et d’espace. On a été très bien accueillis. A mon avis, c’est un travail au long terme… personnellement, j’y retournerais bien, peut-être plusieurs fois, afin de créer un vrai lien ! Je pense que les bonnes choses méritent du temps et de l’investissement.

 

Tu es arrivé dans une résidence où les étudiants ont été confinés. Avez-vous pu sentir comment les étudiants vivent cette période ?

Je trouve que la crise du Covid-19 a recentré les priorités dans la vie quotidienne des gens. Notre métier de comédiens est avant tout un métier d’humain, et nous avons ressenti le besoin de la rencontre et d’échange chez les habitants. Cette forme est la meilleure adaptation qu’on a pu faire pour le théâtre afin de garder le lien avec nos publics. Ce lien est nécessaire, d’autant plus avec les étudiants qui n’ont pas le même bagage culturel… Après la crise, j’espère que cela leur donnerait envie de sortir, que ce soit pour aller au théâtre, au musée ou même au match sportif, afin de retrouver ce lien !

 

Et enfin, est-ce qu’il y a un texte en particulier que tu as eu du plaisir à mettre en voix parmi la sélection « Les échappées » ?

Je pourrais citer le texte « L’Intemporalité Perdue » de Anaïs Nin que nous avons présenté à la résidence de Béthune. Je suis étonné des retours que nous avons eus sur ce texte, qui chemine entre les rêveries d’une femme qui s’ennuyant dans des mondanités, prend un jour un bateau dans un jardin qui voyage dans le temps. Contrairement à mes attentes, ce texte accroche bien le spectateur, il a même été adapté en bande dessinée… lors de ce voyage la jeune femme croise de loin ses amis, sa famille et même des auteurs et artistes qu’elle aime bien. Un jour, elle rentre et découvre qu’elle était partie pendant 20 ans !

 

Propos recueillis par le service vie culturelle et associative.